Verres aux cendres : fusion expérimentale

Retour d’expérimentation – fusion de verres aux cendres
Du 29 septembre au 4 octobre 2025, le four de travail du verre inspiré de modèles du XIIe siècle a été allumé au Domaine de la Verrerie à Carmaux. Après un ultime séchage au feu, le four a été alimenté jour et nuit, avec une température dans la chambre de fusion oscillant entre 1100 et 1200°C. Plusieurs frittes ont été préparées à partir d’un mélange de sable siliceux et de différentes cendres de plantes forestières : fougères, hêtre, chêne et frêne. Ces tests ont permis de constater des comportements très différents selon les mélanges, des observations qui ne pouvaient être réalisées sur de petites quantités en laboratoire, dans un four électrique. Les conditions d’oxydo-réduction et leur impact sur la coloration des verres ont également pu être évaluées selon la teneur en carbone des cendres, la préparation de la fritte et la gestion du combustible bois. Le soufflage de pièces en verre a enfin permis d’évaluer la viscosité et la plasticité des différentes fusions.
À travers cette expérimentation, nous avons pu tout d’abord apprivoiser un type de four chauffé au bois qui n’a jamais été reproduit en archéologie expérimentale. Bien que les dimensions aient été réduites environ de moitié par rapport à celles données par Théophile, nous avons pu apprécier la répartition de la chaleur et le comportement de la flamme entre les deux chambres supérieures communicantes (chambre de fritte et chambre de fusion).


L’occasion nous a également été donnée de quantifier le combustible nécessaire : 10 stères de hêtre refendu en billettes ont été consommés pendant 4 jours et 4 nuits. La gestion de l’alimentation du four pourrait être optimisée, ainsi que la chauffe des deux chambres, mais la fabrication du verre n’en demeure pas moins une activité très énergivore, nécessitant anticipation et participation de bûcherons professionnels pour un approvisionnement en bois sec suffisant tout au long de l’allumage des fours (plusieurs mois par an).
Cette expérimentation a enfin nourri nos réflexions sur le choix et la préparation des matières premières selon le résultat escompté. Les teneurs en alcalins des cendres de fougères sont par exemple particulièrement appréciées pour augmenter la fusibilité du bain, tandis que le manganèse apporté par les cendres de hêtre permet d’obtenir un verre pourpre ou bien de décolorer un mélange.
Les résultats de cette expérimentation seront valorisés par plusieurs biais : communications et articles scientifiques, communications grand public, film documentaire, panneaux fixes et brochure. Nous espérons que ce premier épisode connaîtra une suite, nous permettant de poursuivre ce travail d’archéologie expérimentale qui fait dialoguer plusieurs professions et domaines de recherche et de compétence.
Ce projet a enfin été construit en lien étroit avec les collectivités territoriales, les entreprises et les associations régionales, dans un souci permanent d’impliquer des étudiants et des passionnés, de bâtir des ponts entre les acteurs de la recherche et la société civile et de valoriser la démarche scientifique auprès des citoyens.




Remerciements
Ce projet est financé par le dispositif TIRIS dans le cadre du projet postdoctoral GEMO d’Inès Pactat, et profite également du soutien du Défi Clé Sciences du Passé de la région Occitanie.
L’expérimentation a été conduite sous la houlette de François DUBOIS & Chloé GREVAZ (Les Infondus), verriers professionnels, et d’Inès PACTAT, post-doctorante TIRIS au laboratoire TRACES (UMR 5608). Nicolas GINESTET (Films Cerdan), vidéaste, a assuré l’enregistrement de la totalité de l’expérience et y a également activement participé.
Nous remercions vivement l’équipe de bénévoles qui s’est relayée jour et nuit pour alimenter le four : Jordi MACH (Opera Vitri, Université Paris 8), Isabelle COMMANDRÉ, Killian TRÉTOUT (Laboratoire ASM, Université Paul Valéry Montpellier 3), Thibault BERTUS, Ylian GAY et Ambre SEMPERE LE MOIGNE (Université Paul Valéry Montpellier 3), Leïla HOAREAU, Ruddy et Emmanuelle PAINEAU (Laboratoire TRACES), Rodrigo AREZES PATRAO et Lilas BOSELLI FAVA (Université Toulouse Jean Jaurès), Julien SALETTE (APAREA – Association de Promotion et d’Aide à la Recherche en Archéologie), Bernard ALET, Yvan et Brigitte FARENQ, Luc LEFORT (Centre archéologique des Pays de l’Albigeois), Lena BROECKL (Club Archéologie et patrimoine, MJC de Rodez), Philippe PERGENT (Conseil départemental d’archéologie du Tarn), Nicolas GARNIER et Bruno BOYER (Atelier Toutes Directions), Sylvain GOURC (Cap Plongée 81).
Nous remercions Didier SOMEN, Président de la Communauté de Communes du Carmausin-Ségala, et Philippe VIDAL, Directeur général des services, pour l’accueil de ce projet au Domaine de la Verrerie à Carmaux et pour leur soutien, notamment par la construction d’un abri pour le four et pour l’hébergement mis à disposition. Nous remercions également chaleureusement Laurence MARCHAND et Christel MARTINEZ du Musée du Verre de Carmaux pour leur soutien indéfectible tout au long de ce projet et leur participation active à sa valorisation et à son intégration dans la Biennale des Verriers 2025. Nous remercions les services techniques de la C3S pour leur aide précieuse dans l’installation et le déroulé de cette expérimentation. Nous remercions enfin Stéphanie LEMENICIER et Flore DU BOIS et les élèves de Première et de Terminale du CAP Production et Service en Restaurations du Lycée Polyvalent Jean Jaurès de Carmaux pour nous avoir copieusement et délicieusement restaurés pendant toute la semaine d’expérimentation.
Nous remercions Cyril GUILLOT et Sara ARMENGAUT, administrateurs gestionnaires au Laboratoire TRACES, pour le suivi financier du projet. Nous remercions les entreprises ACM Ateliers & Carrière de Molière (pierres de grès), PRSE (argile réfractaire), Imerys Ceramics France à Thédirac (sable siliceux) et Cédric & Angélique Fourcroy (bois de chauffage) pour leur disponibilité et leur collaboration.
Nous remercions enfin les visiteurs et les verriers professionnels présents à la Biennale des Verriers de Carmaux 2025 pour leur curiosité, leurs encouragements et les échanges féconds qu’une telle expérience n’a pas manqué de susciter avec petits et grands.

